En 1943,
Georges
Rouquier a tourné deux films à Rânes :
La Part de l'enfant et
Le Charron.
Ce sont des films de commande qui lui
permettent d'échapper au
STO.
En exclusivité sur ce siteUn œil innocent ? La carrière et la vision documentaire de Georges Rouquier jusqu’en 1945 par John H. Weiss (format PDF, 22 pages)
Traduction par Patrick Peccatte de l'article :
“
An Innocent Eye? The Career and Documentary Vision of Georges Rouquier up to 1945”
by John H. Weiss, from Cinema Journal, Vol. 20, No. 2 (Spring, 1981), pp. 38-62.
Copyright © 1981 by
The University of Texas Press. All rights reserved.
[Disponible sur
JSTOR]
Traduction effectuée avec l'aimable autorisation de
The University of Texas Press.
Résumé d'après Cinema Journal
: Georges Rouquier, dont les premières tentatives en tant que
cinéaste professionnel ont été
contrecarrées par l'avènement du parlant, a trouvé
une nouvelle occasion de carrière lorsque le régime de
Vichy a décidé de parrainer des documentaires. Ses films
réalisés pendant ou immédiatement après
l'Occupation n'ont cependant pas été influencés
par la propagande de Vichy, mais par la situation de l'Occupation
elle-même et par les images largement partagées de la vie
rurale française.
Lire aussi:
Les premiers films de Georges Rouquier – faits, fictions, dissimulations par Patrick Peccatte, sur Culture Visuelle
Pour en savoir plus
- Biographie de G.
Rouquier par Maria Signorini Rouquier
- Georges
Rouquier sur l'encyclopédie Wikipedia
- Association
Georges Rouquier à Goutrans (Aveyron)
- «
Le printemps... ça revient toujours ! » Genèse de
Farrebique de Georges Rouquier, par Bernard Bastide
- Les
documents cinématographiques, films de Rouquier
- Dominique Auzel, Georges
Rouquier, de Farrebique à Biquefarre,
préface de Jean-Claude Carrière, Petite
Bibliothèque des Cahiers de Cinéma, 2002.
Première édition : 1993
- Dominique Auzel, Autour de Farrebique de Georges
Rouquier, 2009, Séguier
La Part de l'enfant film de Georges Rouquier
Tourné en partie à Rânes en 1943
Ce
film de commande expose le système d'allocations familiales
qui
était alors en oeuvre à Grenoble
et deviendra par la suite un
programme national (cf. John H. Weiss
An Innocent Eye? The
Career and Documentary Vision of Georges Rouquier up to 1945, traduit en français
ici).
D'après la monographie
réalisée par
le syndicat d'initiative de
Rânes en mars 1966, ce film a
été interdit à la
Libération car l'objectif avait malencontreusement
rencontré la photo du Maréchal Pétain,
trop en évidence dans la salle de la Mairie. Cette
séquence a été supprimée dans la copie
distribuée par
Les documents cinématographiques.
Liste des séquences du début du film tournées
à Rânes (4 minutes 20 secondes) :
- Vue sur l'arrière de la
charcuterie Bruneau (détruite à la Libération)
et sur l'église
- L'église et la place
- Le Café du Commerce et
la boutique Albert Sochon
- La
charcuterie (détruite à la Libération)
et la boutique Charles Sérée; on peut voir la
même boutique en train de brûler à la
Libération en août 1944 dans le film tourné par le Signal Corps
- Passage d'une charrette
à cheval
- Vue d'intérieur chez les
Bouchard - Jean Bouchard frictionné par sa mère
Lucienne
- La boutique de chaussure Ferrand et
la pompe à eau près de l'église
- Le petit
déjeûner chez les Bouchard
- Les enfants partent à
l'école et passent devant l'épicerie
- Le maire entre dans la Mairie (qui
sera détruite à la Libération)
- Atelier du bourrelier Godefroy et
son apprenti Daniel
- Atelier du sabotier Charles
Sérée
- Atelier du cordonnier
Roger Ferrand
- Pose d'une roue par Lucien Bouchard
et son fils Claude
- Le jeune Jean Bouchard active le
foyer du charron
- Claude Bouchard fabrique un manche
de marteau puis fait ses devoirs
- Les enfants jouent sur une machine
agricole
- Lucien et Angèle
Bouchard travaillent au jardin
- Angèle Bouchard soigne
ses poules
- Lucien Bouchard dirige son apprenti
à l'atelier
- Lucien Bouchard fait une
remontrance à son apprenti qui met ses coudes sur la table
à manger
- Lucien Bouchard et son
apprenti fabriquent une petite charrette
La suite du film se déroule à Paris ou en
région parisienne puis à Alençon.
En 12'18, fondu enchaîné de la Mairie de
Rânes avec le Château des Ducs à
Alençon.
La fin du film (à partir de 13'14) a
été tourné à la
Noëve, dans la famille Verraquin.
Le Charron film de Georges Rouquier
Tourné à Rânes en 1943.
Durée : 23 minutes
- En
1942, il y avait encore des milliers de charrons en France qui
travaillaient à la réparation de
véhicules à traction animale mais surtout
à la fabrication de roues. Le film nous emmène
dans un village de Normandie, où se trouve l'atelier du
Père Bouchard, charron de père en fils." Le P'tit
Ciné (Bruxelles) "Hommage à Georges Rouquier",
Avril 2005
- "Par
le bois et par le
fer, la fabrication d’une roue, étape par
étape. En noir et blanc, G. Rouquier, dans le respect et la
dignité de l’homme, dans sa noblesse, ses
connaissances et son doigté filme le travail de deux
générations de charrons... le fils remplacera le
père et rien ne sera changé dans ce petit village
de France. Un chef d’oeuvre du documentaire
français." Ecomusée
des Monts du Forez
En fait, la filiation
évoquée dans le scénario est fictive.
Le "Père Bouchard" du film était en
réalité Almire Léger, le
beau-père de Lucien Bouchard (nommé "Louis" dans
le film); il n'était pas charron mais agriculteur. Lucien
Bouchard par contre était bien charron à
l'époque et son fils, Claude, est bien le jeune
"Claude" du film.
Le
Charron (1943)
Extrait
de : Dominique Auzel : Georges
Rouquier, de Farrebique à Biquefarre,
préface de Jean-Claude Carrière, Petite
Bibliothèque des Cahiers de Cinéma, 2002.
Première édition : 1993,
Éditions du Rouergue. pp. 133-140
Reproduit avec
l'aimable autorisation de l'auteur et des Éditions Actes Sud.
Durée :
23 mn. 610
m. 35 mm.
Noir et blanc. Laboratoires : G.T.C. Scénario :
Georges Rouquier. Commentaires : Georges
Rouquier, dit par Maurice Dorléac. Images :
Pierre Levent, assisté d’André
Dumaître. Musique : Henri
Sauguet. Production :
Célia-Films.
L’histoire
Dans un
village de Normandie se trouve l’atelier du père
Bouchard, où l’on est charron de père
en fils. Aux côtés de celui-ci se trouvent son
brave et vaillant fils Louis, ainsi que son petit-fils Claude, qui,
malgré ses dix ou douze ans, ne rate jamais une occasion de
venir apprendre et aider.
Si le charron
excelle dans la réparation et la construction de toutes
sortes de véhicules à traction animale,
c’est dans la fabrication de la roue qu’il montre
le mieux « toute sa science et son
habileté ». Louis accomplit la
première tâche, la confection du moyeu sur le tour
à bois, alors que son père commence la
fabrication des rais. Les opérations sont nombreuses et
complexes, aussi ne faut-il pas perdre de temps ; sciage et
équarrissage des rais, puis finition de ceux-ci à
la plane manuelle, tandis que le moyeu est mis à bouillir
durant deux heures afin que le bois s’assouplisse.
Fidèle à ses habitudes, c’est avec
passion et intérêt que le petit Claude, souvent
juché sur l’une des fenêtres de
l’atelier, observe la plupart de ces étapes, pour
ensuite les mimer et les reproduire sous la forme de jeu en compagnie
de son petit frère, un peu plus loin dans la cour. Mais dans
l’atelier , le travail s’intensifie et
Louis n’est pas économe de sa sueur…
une deuxième peau.
Que le
charron pose enfin son maillet sous l’établi est
signe que la fin de semaine est arrivée. Le dimanche, chaque
membre de la famille Bouchard se fait beau pour aller à la
messe. Ce court jour de repos, le père Bouchard aime bien le
passer en compagnie du plus jeune de ses petits-enfants, alors que
Louis, lui, préfère celle de son copain le
gendarme, avec lequel il peut jouer la traditionnelle partie de dominos.
Hélas, le travail recommence dès le lendemain.
C’est avec ferveur et assiduité que l’on
s’y remet, puisqu’il reste à accomplir
toute l’œuvre du ferrage, laquelle
nécessite ce jour-là l’aide du voisin,
le maréchal-ferrant. Encore une fois, le travail est dur, la
chaleur et intense.
Semaines
après semaines, cette vie continue
jusqu’à ce que, le marteau devenu trop lourd, le
bras du père Bouchard n’en puisse plus
d’avoir tant et tant frappé. Contre son
gré, ce brave et courageux artisan devra se retirer de
l’atelier et désormais n’intervenir que
de loin. Puis un jour il partira, comme sont partis avant lui tous les
Bouchard ; alors, ce jour-là, l’atelier
restera vide et le clocher de l’église du village
sonnera le glas…
L’intelligence
du regard
Le
Charron s’ouvre sur un plan de clocher
d’église, suivi d’un second plan
illustrant un certificat de la corporation des charrons, et sur
lesquels on entend le commentaire suivant :
« En Normandie, chez un charron pris au hasard parmi
les milliers de charrons de France. »
D’emblée, le cinéaste manifeste et
insiste sur ses intentions : il s’agira avant tout
de faire ici le portrait de charrons, d’artisans,
plutôt que des portraits d’individus
spécifiques qui sont charrons. Autrement dit, il sera
davantage question dans ce film de types individualisés, que
d’individualités
« typisées ». Ces
plans du clocher (d’une modeste église de
province) et du certificat de la corporation des charrons illustrent
très bien cette volonté, ce choix, cette
inclinaison du cinéaste vers une caractérisation
socialisante, à la fois douce et marquée, mais
qui, puisqu’elle se manifeste avec goût et
sensibilité, échappe au lourd piège de
l’approche sociologique pure et dure. Qu’on nous
présente tout de suite après les trois
personnages principaux de cette famille Bouchard (le père
Bouchard, son fils Louis, ainsi que son petit Claude) ne change rien
à l’affaire : là, comme dans
le reste du document, prévaudront toujours les traits qui
font de ces gens un type social, ou qui marquent leur sphère
d’appartenance sociale – ce sont des charrons, des
artisans, qui habitent la campagne comme ils sont habités
par elle, et qui donc participent ou s’associent à
une foule de valeurs, traditions et cérémonies
spécifiquement paysannes. Ce n’est donc pas tant
nécessairement l’âme ni le travail des
charrons Bouchard qu’a voulu nous montrer Rouquier, que
l’âme et le travail communs à la plupart
des charrons, ou encore à la plupart de ces familles
paysannes-artisanes. Et si le réalisateur
s’arrête sur les moments de la vie
privée des Bouchard, c’est presque toujours pour
en extraire une essence paysanne ; ces actes, ces gestes, ou
encore ces saynètes plus intimes sont bel et bien
vécus par le père Bouchard, par Louis,
etc… mais leur caractère anecdotique se voit
toujours sublimé par une certaine propension à
l’universalité. On le voit
déjà, Rouquier ne s’est pas
contenté de nous offrir ici un clair et efficace document
illustrant les différentes étapes de la
confection d’une paire de roues, mais il s’est
aussi (et presque tour autant) attaché à nous
dépeindre ceux qui la fabriquaient.
Suite
à cette introduction qui se clôt par la
présentation des principaux membres de la famille Bouchard,
s’amorce avec vivacité le développement
du film, composé de trois parties : celle,
d’une durée assez importante, du début
de la fabrication des roues (et
donc substantiellement technico-didactique) ; celle plus
brève, qui nous montre, le dimanche, la famille Bouchard au
repos ; enfin celle qui illustre les différentes
étapes d’achèvement des roues et
constitue la seconde grande phase de l’exposé
technique. La transition entre l’introduction et la
première partie du développement se fait de
manière assez marquée et nerveuse : une
coupure franche nous fait passer de la présentation du petit
Claude venant de se taper sur les doigts (sur une fond musical qui
décline), à Louis qui entame le premier travail,
celui du moyeu, lequel est décrit à la fois par
l’image et par le commentaire (exposé technique).
Les étapes suivantes (confection et polissage des rais,
immersion du moyeu dans une cuve bouillonnante, enrayage, puis
enfoncement des rais légèrement
inclinés, mesure de l’écuanteur,
découpage des jantes, etc.) sont illustrées par
une alternance de plans rapprochés et de plans moyens ou
d’ensemble, laquelle permet au spectateur de bien saisir le
travail artisanal dans ses plus infimes détails, tout en lui
offrant une vision de l’artisan qui
l’exécute, en symbiose avec son environnement
(l’atelier). Le montage de cette partie du film est rapide,
rythmé et soutenu par une musique de même nature.
De ce montage serré et elliptique, qui fournit une
importante masse d’informations en fort peu de temps,
naît une certaine impression
d’étouffement, de compression. En effet, le
spectateur, bien qu’aidé et assisté par
le commentaire (par ailleurs fort clair et précis), se sent
quelque peu désemparé devant cette
série de plans courts qui se succèdent
à une vitesse vertigineuse, qui vont et viennent sans
vraiment s’être
« laissé regarder ».
Toutefois, quand on connaît les difficultés de
tournage ainsi que les impératifs et contraintes de
production auxquels Rouquier fut soumis [note
1],
force est d’admettre que celui-ci s’en est plus
qu’admirablement tiré. Par ailleurs, ces courts
passages (petits bijoux de digression) prélevés
ça et là, et qui montrent avec
brièveté, tantôt les artisans au repos,
tantôt les gamins s’amusant dans la cour
« à faire les
charrons », etc., viennent interrompre et
aérer de façon brillante ce qui peut justement
paraître trop lourd ou précipité.
De la
même façon, la partie centrale (où
l’on voit les Bouchard au repos) crée une accalmie
en scindant en deux les portions d’exposé
théorique portant sur la fabrication des roues et qui
constituent la majeure partie du développement. Cette pause
des artisans – qui, en quelque sorte, en constitue une
également pour le spectateur – permet, parce
qu’il s’agit d’une illustration de leur
vie privée, de mieux les appréhender en tant que
types d’hommes gravitant au sein d’un groupe social
déterminé. Ainsi, le dimanche, se font-ils tous
beaux pour se rendre à la messe. Le père
Bouchard, qui pourtant excelle dans la fabrication des roues et objets
de toutes sortes, donc dans de durs travaux, ne parvient pas, seul,
à boutonner le col de sa chemise. Rouquier
démontre par ce petit détail sa très
grande connaissance du monde rural : en dehors de son travail,
le paysan est maladroit et, à la limite, s’il ne
travaille plus, il perd sa raison de vivre. Le père Bouchard
aime bien passer ses dimanches en compagnie du plus jeune de ses
petits-fils. Par là, Rouquier marque bien les dimensions de
la tradition, de la filiation, de la passation des pouvoirs fortement
ancrés dans les mœurs paysannes, pour ne pas dire
spécifiques à celles-ci. De plus, cet
élément a le mérite de fournir, en
insistant sur l’importance du temps (le passage
d’une vie) dans le monde paysan, un indice
métaphorique quant au problème de traitement du
temps filmique. Toute cette partie centrale (la pause) du
développement sert en quelque sorte d’ellipse,
laquelle facilite la reconstruction du temps que nécessite
la fabrication d’une paire de roues. En fait, la
quasi-totalité du montage travaille le temps sur un mode
elliptique ; le reconstruction du temps réel en
unités filmiques fut ici pour Rouquier un
problème majeur à surmonter.
Comme la
première partie, la troisième est essentiellement
composée d’un exposé technique, lequel
porte sur l’achèvement de la paire de roues (on
assiste aux différentes opérations de la phase du
ferrage). Pour accomplir cette dernière et dure
tâche, les charrons Bouchard requerront l’aide du
voisin, le maréchal-ferrant. Le travail est complexe, les
étapes nombreuses, et tout doit être
exécuté chronologiquement, avec des gestes
réglés et précis. Cette partie du film
se distingue des précédentes car le montage y est
encore plus serré et rapide. Cela relève sans
doute des conditions de tournage (lorsqu’on chauffe et bat le
fer, on peut difficilement interrompre le travail pour
déplacer la caméra et les lumières),
et le mérite de Rouquier aura, ici,
été double : d’abord parce que
ce passage de l’exposé est tout aussi clair et
précis que les autres ; ensuite parce
qu’en grand cinéaste, il a su tirer parti
d’une sérieuse contrainte en la transformant en
termes de style ou d’effet du langage relié au
propos général (les charrons doivent travailler
rapidement, dans peu d’espace, et avec une infime marge
d’erreur ; les plans seront plus courts, le montage
plus rythmé et ainsi l’esthétique
livrera, elle aussi, sa part d’informations).
Enfin, dans
la scène finale, arrive ce à quoi Rouquier nous
avait lentement préparés tout au long du film[note 2]:
la mort du père Bouchard. Elle témoigne de la
très grande importance de la filiation dans le monde
paysan : le métier ainsi transmis de
père en fils se perpétue. Tous les Bouchard,
ainsi que tous les charrons, finissent par se ressembler, unis par un
même amour du travail.
Le
Charron tient aussi du poème symphonique. Rouquier
fait amitié avec son homme, et, du même coup, il
redécouvre dans sa beauté, dans sa grandeur, la
vie du charron. Nous sommes amenés à entrer avec
lui dans son quotidien, qui acquiert une espèce de sublime
que l’on pourrait qualifier d’homérique.
La gloire d’Homère était
d’avoir su dégager la beauté latente
d’un conducteur de char ou d’un abatteur de
chêne. Cette beauté de l’artisan,
Rouquier l’a redécouverte ici.
Si Le
Charron est un court métrage documentaire se
chargeant d’illustrer l’impressionnant
métier qui lui vaut son titre – ce que, soit dit
en passant, il fait très bien, compte tenu de la
complexité de l’entreprise et de la
durée du film -, il n’en demeure pas moins que
c’est surtout dans la peinture de ses personnages et de leur
milieu que Rouquier laisse apparaître avec le plus
d’efficacité la très belle
sensibilité de son regard et le style
délié de sa caméra. Une
caméra modeste qui ne multiplie pas ce que l’on
nomme des prouesses (ici, peu ou prou de mouvements de
caméra, si ce n’est quelques panoramiques), mais
qui, à la fois par l’intelligence du regard et
grâce à un montage efficace et inspiré,
insuffle au film certains airs de liberté, ou, mieux, une
belle (parce que simple) harmonie.
En 1943,
Rouquier réalise deux autres courts métrages
produits par Étienne Lallier d’une
durée d’une vingtaine de minutes chacun.
L’Économie
des métaux, tourné en région
parisienne montre comment, en période de pénurie,
il est possible de préserver certains métaux
rares par le recours à différentes techniques. Un
court métrage de commande industriel où la
poésie, hélas, n’a pas de place.
Avec La
Part de l’enfant, Rouquier, qui plante sa
caméra en Normandie, esquisse un portrait de la caisse
d’allocation familiale depuis sa création en 1917,
et montre son importance en milieu ouvrier et agricole. Un document
desservi par un commentaire un peu lourd et franchement
démodé, mais porté par des images
d’une rare beauté, signées Pierre
Levent. Rouquier flirte déjà avec la fiction. Les
quatre saisons de Farrebique ne sont pas si
loin…
Note 1-
Dans un entretien donné à
Visages du
monde, n° 82, 1942, p. 15, Rouquier explique que pour
la pose des rais par exemple, il lui était impossible
d’arrêter l’artisan pour
déplacer l’appareil ou changer
l’éclairage. Un peu plus loin, il exprime son
regret quant au métrage du film, beaucoup trop court pour ce
qu’il avait prévu de tourner.
Quelques photogrammes extraits du film "Le Charron"
Nous
remercions vivement Mme
Signorini Rouquier de nous avoir autorisé à
présenter ici ces images.

Facture
affichée au mur de l'atelier:
Charronnage
et forge Lucien Bouchard à Rânes (Orne)
Selon Claude Bouchard, cette image
qui
ouvre le film est à l'origine du changement de nom du
véritable "Lucien" en "Louis", le fils du "Père
Bouchard"
selon le scénario.
"Le
Père Bouchard" [Almire Léger]
"Louis
Bouchard" [Lucien Bouchard]
"Le
petit Claude Bouchard vient de se taper sur les doigts" [Claude
Bouchard]
"Le
Père Bouchard n'arrive pas à boutonner le col de
sa chemise tout seul"
[Almire
Léger et sa fille, Angèle, la femme de Lucien et
mère de Claude]
La
messe à RânesCes scènes ont
peut-être été tournées depuis
l'ancienne mairie détruite à la
Libération
Sortie
de la messe
La foule écoute le garde-champêtre
perché sur le piédestal (qui existe toujours)
Route
de Vieux-Pont
"La
partie de dominos entre Louis et son copain gendarme"
[Lucien
Bouchard
et le gendarme Armand. Au second plan : Ernest Sailly,
réfugié du Nord, qui
travaillait dans l'entreprise Foccart/Tournet]
Photo
de plateau du film "Le Charron" (Celia Films - Bibliothèque du Film, BiFi)
Photo
de plateau du film "Le Charron" (Celia Films - Bibliothèque du Film, BiFi)
Photo
de tournage du film "Le Charron" (Celia Films - Bibliothèque du Film, BiFi)
Pierre
Levent, Georges Rouquier (accroupi) et Lucien Bouchard
Photo
de tournage du film "Le Charron" (Celia Films - Bibliothèque du Film, BiFi)
Lucien Bouchard, Pierre Levent, Georges Rouquier, Almire
Léger.
L'enterrement
du Père
Bouchard
photo d'une scène non conservée dans le film "Le
Charron" (collection Bouchard)
De gauche à
droite : 1. Maurice Floc'h; 2. inconnu; 3. Gaston Verrier
(résistant); 4. Yvonne Blanchard; 5. Roger
Blanchard; 6. Jean Hamon (frère de Pierre,
résistant, mort en déportation); 7. Claude
Bouchard; 8. Lucienne Bouchard. 9. Raymonde Bruneau; 10. Moïse
Guichard (cantonnier, frère de Léonard,
exécuté à la
Libération); 11. Lucien Bouchard ("Louis"); 12.
Jacqueline Niepceron (son père sera tué
à la Libération); 13.
Désiré Villain (exécuté
à la Libération); 14. Almire Léger
("Le Père Bouchard"); 15. Jeannine Bruneau; 16.
Angèle Bouchard (femme de Lucien); 17. Arsène
Bouvier.